Editeur : Delcourt - Traduit de l'anglais (Royaume-Uni) par Claire Desserey - 411 pages formidables.
Alors qu’un renard se faufile entre les passants, une femme et un homme se bousculent sur le Waterloo Bridge à Londres. Jean est une scientifique américaine, spécialiste de la faune sauvage en milieu urbain et Attila un psychiatre ghanéen reconnu dans la thérapie des personnes ayant subi un traumatisme en temps de guerre. Ce dernier parcourt le monde en tant qu’intervenant reconnu tandis que Jean vit à Londres depuis peu. Et à priori, rien ne devrait les amener à se revoir à nouveau.
Sachez que dans ce roman, on parle également de renards, de coyotes mais aussi de végétaux, de relations humaines et de la ville de Londres qui est un personnage à part entière. Jean et Atilla sont tous deux personnes impliquées dans leur travail avec cette volonté d’aider. Et quand un petit garçon disparait, naturellement, ils apportent leur contribution tout comme un portier d’hôtel, un chauffeur mais aussi un aide-soignant et d’autres exilés d'Afrique de l'Ouest. Formant un réseau d’entraide spontanée, ils s’unissent dans un seul et même but et nous immergent de façon inattendue dans cette ville cosmopolite, toujours en mouvement. Au fil des pages, Jean et Attila se dévoilent avec pudeur et humilité.
Les descriptions des renards tout comme celles d’autres animaux s’intègrent naturellement dans le récit sans jamais être ennuyantes ou rébarbatives (et j’ai appris plein de choses). En croisant les vies de ses deux personnage principaux et en nous faisant partager des pans de leur passé et de leurs acquis, Aminatta Forna nous questionne sans mièvrerie sur notre apprivoisement du bonheur.
Un roman généreux, complètement maîtrisé par sa capacité à nous parler d’animaux, d’espaces ou d'émotions que l’homme veut contrôler, de capacité d'adaptation, de résilience sans jamais verser dans les bons sentiments.
Un livre formidable car tout est posé, réfléchi, fluide, creusé intelligemment et très bien dosé ( oui, rien que ça) !
Le coyote la regarde. Elle a failli ne pas le voir tant son pelouse moucheté se confond avec la végétation. Seul le reflet argenté de ses jarres permet de distinguer ses formes. La frontière entre son corps et les jeux du vent dans l'herbe est impalpable. Elle s'immobilise autant qu'elle le peut, soutient son regard. Pendant de longues minutes, sa conscience se réduit à sa respiration, à l'air qui entre et qui sort de ses poumons, aux iris pailletés d'or de l'animal. Un souvenir remonte, suffisamment viscéral pour être réel : l'odeur de sa fourrure le jour où elle l'a endormi pour lui passer le collier, la chaleur qui émanait de lui, les pulsations du sang dans ses veines.
Qu'est-ce une vie sans incident ? Est-ce possible ? Comment devenir humain autrement que dans l'adversité ?
Le billet de Cath
mercredi 30 janvier 2019
lundi 28 janvier 2019
Crash-test ou abandons en série
Pas de billet lecture aujourd'hui car j'enchaine sur des abandons. Petit récapitulatif de ces crash-test...
Editeur : Buchet-Chastel - Date de parution : Janvier 2019
Le début de ce roman a piqué ma curiosité. Mona, 24 ans est femme de ménage sur la journée et le soir elle distribue des seringues propres aux toxicomanes. Elle tombe amoureuse celui qu'elle surnomme Monsieur Dégoutant . Mais les histoires d'amour finissant mal en général, elle part au Nouveau-Mexique pour essayer de donner un autre sens à sa vie. S'en suit des rencontres avec des personnages étonnants voire très surprenants. Mais voilà, je n'ai pas réussi à m'intéresser à l'histoire de ce roman et à ressentir la moindre émotion pour Mona. Un abandon en toute beauté.
Editeur : Buchet-Chastel - Date de parution : Janvier 2019
Dans la catégorie ça part vraiment mais vraiment dans tous les sens : Les amochés de Nan Aurousseau.
Le narrateur vit dans un petit village, il apprécie sa relative solitude et la lecture. Sauf qu'un matin rien n'est comme avant. Tout le monde semble avoir disparu ( sauf un serveur et deux jumelles) et des d'évènements surnaturels ont lieu : de l'eau sort des miroirs, le temps est bloqué ( et j'en passe). Même en y mettant de la bonne volonté, impossible d'y trouver un intérêt quelconque tant l'auteur noie le récit et le lecteur sous une accumulation rocambolesque d'incongruités. Bref, je me suis emmêlée les pinceaux sans chercher à connaître le fin mot de l'histoire.
Editeur : JC Lattes - Date de parution : Janvier 2019
Ah, Kate Atkinson, voilà une auteure que j'affectionne avec des romans toujours fouillés et des constructions puzzle. Juliette est engagée au sein du célèbre MI5 ( le services secrets britannique) pour retranscrire des conversations. Le jeune femme est loin de son rêve d'espionne. Malgré des touches d'humour et un ton alerte, l'ennui a fait fondre ma persévérance comme neige au soleil. Car la lecteur a le droit aux dialogues que la jeune femme doit taper à la machine. Arrivée à la moitié de cette lecture, j'ai jeté l'éponge. Vivement un nouveau Kate Atkinson comme je les aime (ô espoir).
Editeur : Gallmeister - Date de parution en poche : Janvier 2019
Dans le nord du Minnesota, Madeline, 15 ans, se voit proposer par Petra de s’occuper de Paul son fils âgé de 4 ans. Le mari de Petra est très souvent absent pour son travail et très vite, Madeline passe de plus en plus de temps avec Petra et Paul nouvellement installés. Un brin marginale, très solitaire et connaissant les bois comme sa poche, l’adolescente est fascinée par cette famille bien différente de la sienne. Le récit de Madeline adulte qui revient sur ces événements m’a rapidement ennuyée par sa froideur. Et si l’auteure a voulu susciter plus d’intérêt de la part du lecteur en y ajoutant une histoire d’accusation d’abus sexuel par un prof, pour moi ça a eu l’effet d'un cheveu sur la soupe. C'est lent, très lent et les personnages m'ont laissée indifférente, pourquoi poursuivre ?
Editeur : Buchet-Chastel - Date de parution : Janvier 2019
Le début de ce roman a piqué ma curiosité. Mona, 24 ans est femme de ménage sur la journée et le soir elle distribue des seringues propres aux toxicomanes. Elle tombe amoureuse celui qu'elle surnomme Monsieur Dégoutant . Mais les histoires d'amour finissant mal en général, elle part au Nouveau-Mexique pour essayer de donner un autre sens à sa vie. S'en suit des rencontres avec des personnages étonnants voire très surprenants. Mais voilà, je n'ai pas réussi à m'intéresser à l'histoire de ce roman et à ressentir la moindre émotion pour Mona. Un abandon en toute beauté.
Editeur : Buchet-Chastel - Date de parution : Janvier 2019
Dans la catégorie ça part vraiment mais vraiment dans tous les sens : Les amochés de Nan Aurousseau.
Le narrateur vit dans un petit village, il apprécie sa relative solitude et la lecture. Sauf qu'un matin rien n'est comme avant. Tout le monde semble avoir disparu ( sauf un serveur et deux jumelles) et des d'évènements surnaturels ont lieu : de l'eau sort des miroirs, le temps est bloqué ( et j'en passe). Même en y mettant de la bonne volonté, impossible d'y trouver un intérêt quelconque tant l'auteur noie le récit et le lecteur sous une accumulation rocambolesque d'incongruités. Bref, je me suis emmêlée les pinceaux sans chercher à connaître le fin mot de l'histoire.
Editeur : JC Lattes - Date de parution : Janvier 2019
Ah, Kate Atkinson, voilà une auteure que j'affectionne avec des romans toujours fouillés et des constructions puzzle. Juliette est engagée au sein du célèbre MI5 ( le services secrets britannique) pour retranscrire des conversations. Le jeune femme est loin de son rêve d'espionne. Malgré des touches d'humour et un ton alerte, l'ennui a fait fondre ma persévérance comme neige au soleil. Car la lecteur a le droit aux dialogues que la jeune femme doit taper à la machine. Arrivée à la moitié de cette lecture, j'ai jeté l'éponge. Vivement un nouveau Kate Atkinson comme je les aime (ô espoir).
Editeur : Gallmeister - Date de parution en poche : Janvier 2019
Dans le nord du Minnesota, Madeline, 15 ans, se voit proposer par Petra de s’occuper de Paul son fils âgé de 4 ans. Le mari de Petra est très souvent absent pour son travail et très vite, Madeline passe de plus en plus de temps avec Petra et Paul nouvellement installés. Un brin marginale, très solitaire et connaissant les bois comme sa poche, l’adolescente est fascinée par cette famille bien différente de la sienne. Le récit de Madeline adulte qui revient sur ces événements m’a rapidement ennuyée par sa froideur. Et si l’auteure a voulu susciter plus d’intérêt de la part du lecteur en y ajoutant une histoire d’accusation d’abus sexuel par un prof, pour moi ça a eu l’effet d'un cheveu sur la soupe. C'est lent, très lent et les personnages m'ont laissée indifférente, pourquoi poursuivre ?
vendredi 25 janvier 2019
Paula Poronni - Bonne élève
Editeur : Les Editions Noir Sue blanc - Traduit de l’espagnol (Argentine) par Marianne Million Date de parution : Janvier 2019 - 140 pages qui n'ont pas su me convaincre
Ne trouvant pas de travail à Buenos Aires, la narratrice, une jeune fille argentine, revient en Angleterre où elle a obtenu un diplôme en histoire de l'art. Sa mère subvient seulement à ses besoins pour un temps, son père décédé ayant laissé un petit héritage. Elle espère sortir la tête de l'eau et raccrocher avec les petits boulots qu'elle exerce. Mais les offres d'emploi sont rares et quand il y en a une, elle doit s'arranger pour faire disparaître quelques années de son CV. Mais, elle parvient à décrocher une bourse pour une thèse. Certes, l'université n'est pas prestigieuse mais c'est déjà ça.
La narratrice vit dans la peur d'échouer et celle engendrée par sa mère qui surveille à la loupe ses dépenses. Constamment sous pression, elle va d' hébergements temporaires en sous-locations minables. Enfermée dans une spirale avec une épée de Damoclès au-dessus de sa tête, elle inflige à son corps des mutilations et des privations.
Ce court roman est assez anxiogène et je suis très partagée car j'ai trouvé l'ensemble très inégal. Il y a des passages assez crus ou sans intérêt et j'ai souvent eu l'impression de tourner un peu en rond sans comprendre où l'auteure voulait en venir. Avec une écriture sans artifices, cette lecture n'a pas su me convaincre. Dommage...
Les billets de Cath, Eimelle, Mimi
mercredi 23 janvier 2019
Thierry Beinstingel - Il se pourrait qu'un jour je disparaisse sans trace
Editeur :Fayard - Date de parution : Janvier 2019 - 288 pages beaucoup, beaucoup aimées !
Ils sont trois : une professeure d’Allemand au lycée, une jeune fille ayant mis en pause ses études et un homme au chômage. La professeure subit ses cours, n’a plus d’entrain à enseigner. Elle et sa fille sont deux étrangères vivant sous le même toit, chacune enfermée dans ses préoccupations. Et puis un jour un élève l’insulte, elle franchit la ligne rouge. Mise en arrêt de travail, elle commence à donner des cours de français à des adultes étrangers dans un centre qui accueille des migrants, collecte et revend des meubles, des vêtements. Malgré les difficultés rencontrées dans son activité de bénévole, elle ne baisse pas les bras bien au contraire.
La jeune fille, elle, a trouvé un petit boulot : s’occuper d’un garçon autiste. Un job rémunéré en cash par la mère du garçon qu’elle ne voit jamais dans le petit appartement insalubre de le tour qui va bientôt être démolie. Elle pourrait alerter les services sociaux de la situation ou s'en tenir strictement aux consignes : préparer un repas au garçon, rester un peu avec lui et s'en aller. Mais elle s’attache à lui et essaie malgré son mutisme de créer un lien, si fragile, soit-il avec lui.
L’homme lui se voit proposer un travail pour cinq mois payés 20 000 Euros sans aucun frais. Pas de loyer, pas de nourriture pour être agent d’entretien sur une station de pompage à l’étranger. Il accepte, se voit déjà revenir triomphant avec l’argent. Sauf que la situation sur place est bien loin de ce qu’on lui a vendu. Il est seul, ne dispose pas d’électricité ou d’eau courante sans aucun repère du temps qui passe, "il doit affronter la nature, développer sa réflexion et la créativité qui sont la marque spécifique des humains".
Avec ces personnages sans lien apparent, isolés, bousculés et déstabilisés dans leurs repères, Thierry Beinstingel nous confronte à la réalité de ceux qui n’ont plus rien mais aussi de ceux qui semblent s'effacer de leur vie. Sans se faire donneur de leçons ou d’user de bons sentiments, il modifie le regard du lecteur et l’amène à reconsidérer ou à percevoir différemment une situation et surtout à se démettre de jugements hâtifs.
Non seulement, il y a l'histoire qui happe le lecteur et la construction intrigante de ce roman renforce ce sentiment d'immersion (un livre lu, vous l'aurez compris, en apnée totale). J'aime l'humanité de cet auteur, j'aime comment il s'empare de sujets de société pour nous interpeller, j'aime son écriture fine et sa précision des mots.
Une lecture forte, riche en émotions et en réflexions.
Chacun court après sa vie élabore son petit confort comme Robinson sur la gravure : une table pour asseoir sa posture, un buffet pour le peu qu'on possède sur terre, un perroquet en miroir pour être toujours d'accord avec soi-même. Et comme Robinson, on craint depuis toujours que débarque un Vendredi pour bousculer nos habitudes. Le migrant d'aujourd'hui joue ce rôle. L'humanité entière reste à rassembler.
La perspective d'une intégration par l'alphabétisation est une flatterie démagogique, ici, personne n'est dupe.
Lu de cet auteur : Ils désertent - Retour aux mots sauvages
Ils sont trois : une professeure d’Allemand au lycée, une jeune fille ayant mis en pause ses études et un homme au chômage. La professeure subit ses cours, n’a plus d’entrain à enseigner. Elle et sa fille sont deux étrangères vivant sous le même toit, chacune enfermée dans ses préoccupations. Et puis un jour un élève l’insulte, elle franchit la ligne rouge. Mise en arrêt de travail, elle commence à donner des cours de français à des adultes étrangers dans un centre qui accueille des migrants, collecte et revend des meubles, des vêtements. Malgré les difficultés rencontrées dans son activité de bénévole, elle ne baisse pas les bras bien au contraire.
La jeune fille, elle, a trouvé un petit boulot : s’occuper d’un garçon autiste. Un job rémunéré en cash par la mère du garçon qu’elle ne voit jamais dans le petit appartement insalubre de le tour qui va bientôt être démolie. Elle pourrait alerter les services sociaux de la situation ou s'en tenir strictement aux consignes : préparer un repas au garçon, rester un peu avec lui et s'en aller. Mais elle s’attache à lui et essaie malgré son mutisme de créer un lien, si fragile, soit-il avec lui.
L’homme lui se voit proposer un travail pour cinq mois payés 20 000 Euros sans aucun frais. Pas de loyer, pas de nourriture pour être agent d’entretien sur une station de pompage à l’étranger. Il accepte, se voit déjà revenir triomphant avec l’argent. Sauf que la situation sur place est bien loin de ce qu’on lui a vendu. Il est seul, ne dispose pas d’électricité ou d’eau courante sans aucun repère du temps qui passe, "il doit affronter la nature, développer sa réflexion et la créativité qui sont la marque spécifique des humains".
Avec ces personnages sans lien apparent, isolés, bousculés et déstabilisés dans leurs repères, Thierry Beinstingel nous confronte à la réalité de ceux qui n’ont plus rien mais aussi de ceux qui semblent s'effacer de leur vie. Sans se faire donneur de leçons ou d’user de bons sentiments, il modifie le regard du lecteur et l’amène à reconsidérer ou à percevoir différemment une situation et surtout à se démettre de jugements hâtifs.
Non seulement, il y a l'histoire qui happe le lecteur et la construction intrigante de ce roman renforce ce sentiment d'immersion (un livre lu, vous l'aurez compris, en apnée totale). J'aime l'humanité de cet auteur, j'aime comment il s'empare de sujets de société pour nous interpeller, j'aime son écriture fine et sa précision des mots.
Une lecture forte, riche en émotions et en réflexions.
Chacun court après sa vie élabore son petit confort comme Robinson sur la gravure : une table pour asseoir sa posture, un buffet pour le peu qu'on possède sur terre, un perroquet en miroir pour être toujours d'accord avec soi-même. Et comme Robinson, on craint depuis toujours que débarque un Vendredi pour bousculer nos habitudes. Le migrant d'aujourd'hui joue ce rôle. L'humanité entière reste à rassembler.
La perspective d'une intégration par l'alphabétisation est une flatterie démagogique, ici, personne n'est dupe.
Lu de cet auteur : Ils désertent - Retour aux mots sauvages
lundi 21 janvier 2019
Christine Desrousseaux - En attendant la neige
Editeur : Calmann-Lévy - Date de parution : Janvier 2019 - 288 pages à découvrir !
Vera est mal en point et elle a de quoi. En effet, cette jeune femme a occasionné un accident de voiture qui a coûté la vie à sa mère. Après avoir été dans le coma, elle n’a plus aucun souvenir du drame, et c’et sa sœur qui lui appris ce qui s’est passé. Les neuroleptiques, les séances de kiné et les visites chez le neurologue rythment sa vie désormais. Vera décide de partir dans un chalet dans le Haut-Jura prêté par un ami pour se sevrer des médicaments et se soustraire à sa sœur un peu trop présente.
Le chalet est isolé et la neige peut vite bloquer l’accès. Qu’importe si c’est l’hiver, de toute façon Vera n’est pas venue pour nouer des relations. Une ambiance pesante est vite distillée : au village, les habitants ne sont pas très loquaces, et son plus proche voisin est mystérieux et taciturne. Ajoutez-y des chasseurs, le corps d’une jeune femme retrouvée dans une faille et la neige qui tombe à foison. L’introspection et les interrogations de Vera sont le fil rouge et le lecteur se demande si le cerveau de la jeune femme ne lui joue pas des tours.
Avec des descriptions de la nature qui font appel à tous les sens, des ambiguïtés qui plongent le lecteur dans le doute, l’auteure met l’accent sur la psychologie de ses personnages en instaurant une ambiance prenante. Malgré un thème de départ assez convenu, j’ai aimé la façon dont Christine Desrousseaux déroule les intrigues (car il n’y en a pas qu’une). A découvrir !
Chaque matin, je dois revivre ce jour maudit, reprendre le volant, rouler sous la pluie et rejoindre le camion, maudit lui aussi, qui a croisé ma route. C’est devenu un rite quotidien, une épreuve nécessaire pour aboutir à une forme de délivrance. Le pire pour moi serait de laisser l’amnésie prendre le pouvoir.
Le billet de Zazy
Vera est mal en point et elle a de quoi. En effet, cette jeune femme a occasionné un accident de voiture qui a coûté la vie à sa mère. Après avoir été dans le coma, elle n’a plus aucun souvenir du drame, et c’et sa sœur qui lui appris ce qui s’est passé. Les neuroleptiques, les séances de kiné et les visites chez le neurologue rythment sa vie désormais. Vera décide de partir dans un chalet dans le Haut-Jura prêté par un ami pour se sevrer des médicaments et se soustraire à sa sœur un peu trop présente.
Le chalet est isolé et la neige peut vite bloquer l’accès. Qu’importe si c’est l’hiver, de toute façon Vera n’est pas venue pour nouer des relations. Une ambiance pesante est vite distillée : au village, les habitants ne sont pas très loquaces, et son plus proche voisin est mystérieux et taciturne. Ajoutez-y des chasseurs, le corps d’une jeune femme retrouvée dans une faille et la neige qui tombe à foison. L’introspection et les interrogations de Vera sont le fil rouge et le lecteur se demande si le cerveau de la jeune femme ne lui joue pas des tours.
Avec des descriptions de la nature qui font appel à tous les sens, des ambiguïtés qui plongent le lecteur dans le doute, l’auteure met l’accent sur la psychologie de ses personnages en instaurant une ambiance prenante. Malgré un thème de départ assez convenu, j’ai aimé la façon dont Christine Desrousseaux déroule les intrigues (car il n’y en a pas qu’une). A découvrir !
Chaque matin, je dois revivre ce jour maudit, reprendre le volant, rouler sous la pluie et rejoindre le camion, maudit lui aussi, qui a croisé ma route. C’est devenu un rite quotidien, une épreuve nécessaire pour aboutir à une forme de délivrance. Le pire pour moi serait de laisser l’amnésie prendre le pouvoir.
Le billet de Zazy
vendredi 18 janvier 2019
Brian Morton - La vie selon Florence Gordon
Editeur : 10/18 - Traduit l'anglais ( Etats-Unis) par Michèle Hechter - Date de parution : Mars 2017 (date de première parution : 2015) - 355 pages menées sans temps mort !
Avertissement : on ne se s’arrête surtout pas à la couverture affreuse qui ne donne pas du tout envie de se plonger dans ce roman. Surtout que la mamie dessinée ne ressemble pas le moins du monde à l’image que l’on peut se faire de Florence Gordon.
A soixante-quinze, cette féministe de la première heure et auteure de plusieurs essais sur le sujet compte bien rédiger ses mémoires. Avec son caractère bien trempé, elle a pour habitude de formuler sans ambages ce qu’elle pense et sans se soucier d’y mettre les formes. Et ça vaut aussi bien pour ses amies que pour sa famille. Justement son fils unique, son épouse et leur fille adolescente viennent s’installer à New-York. Non seulement, ça ne lui fait pas plaisir mais pour couronner le tout, elle se retrouve sur le devant de la scène intellectuelle.
Vous l’aurez compris, Florence Gordon n’est pas une mamie gâteau, loin de là ! Malgré la présence de sa famille qu’elle ne voit pas souvent, elle veut continuer son travail de rédaction bien plus important à ses yeux. Sa belle-fille pétrie d’admiration envers elle l’agace, sa petite-fille la laisse de marbre (elle l’appelle par un prénom presque différent à chaque fois) et son fils est une source de déception professionnelle pour elle.
Si Florence Gordon a une haute opinion d'elle même, elle apprécie toujours de voir ses amies de longue date qui la connaissant bien la supportent comme elle est. Même si ses remarques peuvent être mordantes ou blessantes, elle n'est jamais pour autant détestable car l'auteur Brian Morton joue sur preuve sa vivacité brillante d’esprit et sa lucidité sans égale. Et ça fonctionne !
Souvent caustique et mené sans temps mort, ce roman nous parle de la vieillesse, des relations familiales et de la transmission. On sourit, on rit aussi ( quelquefois jaune) et on est touché. J'ai juste un bémol pour la fin un peu trop vite expédiée à mon goût.
Elle était une guérilla, une saboteuse, une pro du guet-apens. Son métier, c'était l'essai. Des livres qu'elle avait écrits, la majorité était des recueils d'essais, les autres étaient des recueils d'essai déguisés.
Les billets d'Aifelle, Cathulu, Cuné et Kathel
Avertissement : on ne se s’arrête surtout pas à la couverture affreuse qui ne donne pas du tout envie de se plonger dans ce roman. Surtout que la mamie dessinée ne ressemble pas le moins du monde à l’image que l’on peut se faire de Florence Gordon.
A soixante-quinze, cette féministe de la première heure et auteure de plusieurs essais sur le sujet compte bien rédiger ses mémoires. Avec son caractère bien trempé, elle a pour habitude de formuler sans ambages ce qu’elle pense et sans se soucier d’y mettre les formes. Et ça vaut aussi bien pour ses amies que pour sa famille. Justement son fils unique, son épouse et leur fille adolescente viennent s’installer à New-York. Non seulement, ça ne lui fait pas plaisir mais pour couronner le tout, elle se retrouve sur le devant de la scène intellectuelle.
Vous l’aurez compris, Florence Gordon n’est pas une mamie gâteau, loin de là ! Malgré la présence de sa famille qu’elle ne voit pas souvent, elle veut continuer son travail de rédaction bien plus important à ses yeux. Sa belle-fille pétrie d’admiration envers elle l’agace, sa petite-fille la laisse de marbre (elle l’appelle par un prénom presque différent à chaque fois) et son fils est une source de déception professionnelle pour elle.
Si Florence Gordon a une haute opinion d'elle même, elle apprécie toujours de voir ses amies de longue date qui la connaissant bien la supportent comme elle est. Même si ses remarques peuvent être mordantes ou blessantes, elle n'est jamais pour autant détestable car l'auteur Brian Morton joue sur preuve sa vivacité brillante d’esprit et sa lucidité sans égale. Et ça fonctionne !
Souvent caustique et mené sans temps mort, ce roman nous parle de la vieillesse, des relations familiales et de la transmission. On sourit, on rit aussi ( quelquefois jaune) et on est touché. J'ai juste un bémol pour la fin un peu trop vite expédiée à mon goût.
Elle était une guérilla, une saboteuse, une pro du guet-apens. Son métier, c'était l'essai. Des livres qu'elle avait écrits, la majorité était des recueils d'essais, les autres étaient des recueils d'essai déguisés.
Les billets d'Aifelle, Cathulu, Cuné et Kathel
mercredi 16 janvier 2019
Bernhard Schlink - Olga
Editeur : Gallimard - Traduite de l'allemand par Traduit par Bernard Lortholary - Date de parution : Janvier 2019 - 272 subtiles et élégantes
Après le décès de ses parents, Olga doit quitter la Sibérie pour suivre sa grand-mère paternelle, une femme dure et au cœur sec, en Poméranie. Elle se lie d’amitié Herbert et Viktoria, les enfants d’un riche industriel. Elle et Herbert tombent amoureux mais sa condition très modeste est un frein pour la famille d’Herbert.
Nous sommes au début du XXème siècle. Olga est déterminée à devenir institutrice et elle le devient en surmontant bien des difficultés. Assoiffé d'immensité, Herbert s'engage dans l'armée pour combattre en Afrique. Il en reviendra toujours assoiffé de conquêtes. Puis ce sera l'Argentine et une expédition à destination de l'Arctique qui doit être la première à franchir le Passage Nord-Est. Pendant ce temps, Olga trompe l'attente et la solitude en s'occupant en plus de son travail du jeune Eik l'enfant de voisins. Mais les mois se transforment en années, et elle n'a toujours aucune nouvelle d'Herbert. L’Histoire se déroule avec la Première Guerre mondiale puis la Seconde et Olga connaît à nouveau la douleur. Après avoir perdu Herbert obnubilé par ses rêves, elle voit Eik ébloui par la propagande nazie s’engager au service des SS. Devenue sourde et âgée, Olga travaille comme simple couturière dans une famille.
Je n’en dirai pas plus sur l’histoire sauf que la dernière partie est riche en surprises et en émotions. A travers la vie d’Olga, Bernard Schlink retrace l'histoire de l'Allemagne sur plus d'un siècle avec ses rêves de grandeur, ses fantasmes de domination et de puissance. Un beau portrait d’une femme forte et intelligente bousculée par l’Histoire et par les fantasmes de grandeur des hommes. C'est subtil et élégant !
Si calmement qu'elle revînt sur les périodes où elle avait été séparée de Herbert, l'attirance qu'avait éprouvée celui-ci pour des lointains immenses n'avait pas cesser de lui inspirer du dépit.Tant que Herber avait été jeune, elle avait trouvé cette attirance attendrissante, plus tard elle l'avait trouvée absurde. "Le désert - dans le désert de sable il voulait forer des puits et construire des usines, et dans le désert de glace explorer le Passage et conquérir le pôle, mais tout cela était beaucoup trop grand, et d'ailleurs ce n'étaient que des discours. Dans le désert il ne voulait rien faire, il voulait s'y perdre. Il voulait se perdre dans l'immensité. Mais l'immensité n'est rien. Il voulait se perdre dans le néant."
lundi 14 janvier 2019
Théodore Bourdeau - Les petits garçons
Editeur : Stock - Date de parution : Janvier 2019 - 256 pages et un avis très, très mitigé
Deux garçons nouent une amitié forte et ne vont pas se quitter. De l'enfance au début de l'âge adulte en passant par l'adolescence, on suit Grégoire, le travailleur acharné et cultivé à qui tout sourit et le narrateur, un élève moyen lambda. Malgré des caractères et des origines sociales différentes, leur amitié résiste au fil des années. Promu à une brillante carrière politique, le destin de Grégoire semble tout tracé d'avance tandis que celui du narrateur prend des chemins de traverse.
Les études, l'amour, l'entrée dans la vie active où les deux garçons commencent à voler de leurs propres ailes sont ainsi relatés au fil des pages. A l'opposé de Grégoire, le narrateur est timide et il cherche sa place en essayant de s'affirmer.
Avec Grégoire, on découvre les arcanes du pouvoir politique (on sent que l'auteur a puisé des éléments dans la réalité) et en parallèle les dessous du journalisme d'aujourd'hui.
Résolument contemporain, ce premier roman souffre malgré tout d'une première partie sur l'enfance qui s'éternise et d'une histoire un peu fade malgré quelques pointes d'humour.
Au final, j'ai trouvé ce premier roman sans surprises (rien de nouveau) et selon moi, il lui manque un supplément d'âme.
A cet instant précis, Luc vantait à notre petit comité les mérites du skateboard. C'était un sport qui présentait l'avantage de ne pas nécessiter d'accoutrement ridicule, de tenue moulante. Au contraire, avoir la dégaine du groupe du chanteur le plus triste au monde constituait un plus.
Le billet de Nicole enthousiaste par rapport à moi.
vendredi 11 janvier 2019
Denis Michelis - Etat d'ivresse
Editeur : Editions Noir Sur Blanc - Date de parution : Janvier 2019 - 140 pages saisissantes.
Avec le titre, le ton est donné. L’alcool chez les femmes est un sujet tabou dont on parle peu et ce roman s’y attaque.La narratrice est alcoolique. Mariée, mère d’un adolescent, journaliste pour un magazine de bien-être, elle noie ses journées et/ou ses nuits dans l’alcool. Avec son mari en déplacement pour son travail et son fils au lycée, elle se trouve des excuses pour un verre puis un autre.
Elle boit en solitaire, s’enfile des bouteilles qu’elle garde soigneusement cachées. Cerveau embrumé, gestes ralentis maladroits : la confusion s’installe et embrouille sa perception des lieux et du temps. S’enfermant dans une spirale proche de la paranoïa, tout est prétexte pour elle pour boire encore plus.
On est plongé dans son escalade de mensonges, dans cette folie où elle est acerbe, dénuée d’amour. Il y a aussi les quelques moments rares où elle est lucide. Malgré les tentatives d’aide de son fils, on assiste impuissant à sa chute et le désarroi de la famille prend à la gorge.
Prenant la tournure d’un huis-clos, ce roman dresse un portrait saisissant. Denis Michelis n'avance pas de raisons du pourquoi ou du comment de l’alcoolisme chez cette femme, il s’en tient aux conséquences directes, aux dommages collatéraux et ça fait mal.
J'envisage de me mettre à genoux ou de ramper, lorsqu'on vous accuse d'avoir perdu toute dignité, vous pouvez tout vous permettre.
Au moment de servir, il me rappelle que l’eau n’a jamais tué personne. L’alcool, si.
Une lecture via NetGalley (#NetGalleyFrance).
Avec le titre, le ton est donné. L’alcool chez les femmes est un sujet tabou dont on parle peu et ce roman s’y attaque.La narratrice est alcoolique. Mariée, mère d’un adolescent, journaliste pour un magazine de bien-être, elle noie ses journées et/ou ses nuits dans l’alcool. Avec son mari en déplacement pour son travail et son fils au lycée, elle se trouve des excuses pour un verre puis un autre.
Elle boit en solitaire, s’enfile des bouteilles qu’elle garde soigneusement cachées. Cerveau embrumé, gestes ralentis maladroits : la confusion s’installe et embrouille sa perception des lieux et du temps. S’enfermant dans une spirale proche de la paranoïa, tout est prétexte pour elle pour boire encore plus.
On est plongé dans son escalade de mensonges, dans cette folie où elle est acerbe, dénuée d’amour. Il y a aussi les quelques moments rares où elle est lucide. Malgré les tentatives d’aide de son fils, on assiste impuissant à sa chute et le désarroi de la famille prend à la gorge.
Prenant la tournure d’un huis-clos, ce roman dresse un portrait saisissant. Denis Michelis n'avance pas de raisons du pourquoi ou du comment de l’alcoolisme chez cette femme, il s’en tient aux conséquences directes, aux dommages collatéraux et ça fait mal.
J'envisage de me mettre à genoux ou de ramper, lorsqu'on vous accuse d'avoir perdu toute dignité, vous pouvez tout vous permettre.
Au moment de servir, il me rappelle que l’eau n’a jamais tué personne. L’alcool, si.
Une lecture via NetGalley (#NetGalleyFrance).
mercredi 9 janvier 2019
Olivia Elkaim - Je suis Jeanne Hébuterne
Editeur : Points - Date de parution : Août 2018 - 216 pages à découvrir.
Décembre 1916, Jeanne Hébuterne s’adonne à la peinture en tant que loisir. Poussée par son frère parti au combat, cette jeune fille de dix-huit ans s’inscrit dans une académie de peinture où elle tombe amoureuse d'Amedeo Modigliani.
Le peintre sulfureux plus âgé qu’elle l’entraîne dans une autre vie parisienne. Issue d’une famille catholique et bourgeoise, la jeune fille jusque-là rangée découvre les amis peintres de Modigliani mais aussi la misère, la faim, l’alcool. Une vie de bohème sans confort car le peintre est sans le sou. Elle est son modèle, sa muse et ne peint plus. Jeanne doit s'accommoder des conquêtes (anciennes et nouvelles) du peintre comme de son humeur changeante et de son besoin de liberté.
De cette passion incandescente qui flirte avec la folie, Jeanne tente de s’émanciper des carcans sociétaux et familiaux. Elle met au monde une fille mais l'issue tragique apparait inéluctable et elle l’est.
Le contraste est saisissant entre le récit fiévreux de Jeanne et les lettres de son frère André qui lui ordonne de s'absoudre à cette vie de débauche. Ce frère autoritaire entretient une relation exclusive et malsaine envers sa soeur.
Dans ce récit sous forme de journal tenu par Jeanne, l’auteure nous amène de l’emprise destructrice de son frère aux confins de cet amour passionnel, violent.
Porté par un souffle enivrant, ce récit se lit d’une traite. C’est fort et ça secoue. Non seulement, on est immergé dans l'univers de Modigliani mais également dans celui contextuel de l'époque aves des préjugés et des normes. A découvrir !
Mon corps se dérobe, mon âme vagabonde entièrement aspirés pour n’exister qu’immobiles et figés sur les tableaux de Modigliani.
Plein d'autres avis sur Babelio et Bibliosurf.
lundi 7 janvier 2019
Erwan Desplanques - L'Amérique derrière moi
"Mon père ouvrit une bouteille de champagne pour nous annoncer la nouvelle. Avec calme, sans gravité. Un cancer du poumon, stade quatre." Deux jours plus tard, l’auteur apprend qu’il va être papa dans quelques mois. Dans cet interstice émotionnel où l’arrivée du futur évènement devrait le combler de joie, il lui faut se préparer au pire.
L’occasion pour lui de retracer son enfance marquée par l’admiration sans bornes de ce père pour les Etats-Unis. Une fascination excessive tout comme l'était son père qui allait même jusqu' à porter porter des chaussettes avec le dessin de la Maison Blanche ou à acheter des vêtements de l'armée américaine pour lui et pour ses fils. En remontant l'histoire familiale, on découvre que la passion irraisonnée de son père est bien plus complexe qu'il n'y paraît.
L'ensemble du récit oscille entre la comédie (tant ses parents formaient un couple détonnant et étonnant), la tendresse et la lucidité dont l’auteur fait part "Mon grand-père maternel s'était engagé dans l'armée à dix-neuf ans, mon père à dix-huit. La premier avait été autant marqué par la guerre que le second par son absence. Ma famille s'était bâtie sur cette double fêlure, celle d'une guerre subie et d'une guerre réclamée, et je me voyais comme un dommage collatéral, conscient d'avoir devant lui un écheveau à résoudre et une mémoire à porter. "
C'est fluide car Erwan Desplanques a su trouver la distance qu’il fallait. Le lecteur se sent proche sans être voyeuriste. ll y a une telle puissance dans la description des moments qui suivent la mort de son père que j’ai eu la gorge serrée d’émotions.
Du début à la fin, c’est beau, élégant, pudique sans jamais être larmoyant et les dernières pages sont intenses ( je n'en dis pas plus sauf que le titre y prend toute sa signification).
Un livre tout simplement sobre, sensible et tout en pudeur. J’ai vibré. Et si la première rencontre avec cet auteur m'avait déçue (Si j'y suis) et bien là c'est tout l'inverse.
Ma mère m’avait appris à parler pour rien, à parler dans le vide, à parler pour deux ou pour trois. Trop parler est une autre forme de défense. Comme écrire ou chanter. Une voix parallèle.
Les Etats-Unis représentaient à ses yeux la possibilité de s’inventer, de bâtir ses propres fictions. C’était une terre de conquête, de résilience, de progrès.
vendredi 4 janvier 2019
Laurence Tardieu - Nous aurons été vivants
Editeur : Stock - Date de parution : Janvier 2019 - 272 pages touchantes
Un matin de janvier comme un autre, Lorette aperçoit une silhouette de l’autre côté d’un boulevard et elle se fige. Elle l'a reconnue, il s’agit de sa fille Hannah qui est partie sans un mot sept ans plus tôt. Reprendre son souffle, accélérer le pas mais déjà il n’y a plus personne.
Est-ce qu’elle a fantasmé cette image ? Et si c’était bien Hannah qui se trouvait à quelques mètres plus loin ? Lorette aimerait se ressaisir et donner le change. Des questions déjà ressassées, des interrogations et la douleur jaillissent à nouveau. Elle est propulsée dans ses souvenirs, dans la vie avant que sa fille disparaisse. Comme un vieux film que l'on connaît par coeur et que l'on visionne à nouveau, Lorette se remémore Hannah petite, les difficultés à concilier sa vie de peintre et de mère, son amie Lydie à l’amitié sans faille et toujours présente pour elle. Mais aussi l’adolescence d’Hannah, sa propre jeunesse, l’insouciance de croire au bonheur illusoire d’un monde qui change puis l’envie de rien qui s’est installé à partir du jour où Hannah a disparu.
Roman sur le temps qui passe mais aussi sur celui que l'on refuse de s’accorder pour sourire et pour renouer avec des lendemains possibles. Comment retrouver l’étincelle pour avancer en dépit des fardeaux du passé ou d’un présent sans saveur en se délestant de la peur ?
Ceux qui aiment (et dont j'en fais partie) l’écriture sensible et délicate de Laurence Tardieu seront ravis par ce nouveau roman. Comme avec chacun de ses livres, j’ai été très touchée. Touchée par Lorette, par les questionnements, les émotions des personnages et par le maillage de ces vies si finement décrites.
Lorette en partant nous a enfermés dans un espace dont nous ne pouvons pas sortir, contre les parois duquel nous n'en finissions pas de nous échouer, et qui d'année en année se rétrécit.
Le billet d'Antigone et celui d'Eimelle.
Lu cette auteure : A la fin le silence - L'écriture et la vie - La confusion des peines - Une vie à soi
mercredi 2 janvier 2019
Juliana Léveillé-Trudel - Nirliit
Editeur : La peuplade - Date de parution : 2018 - 184 pages et un flirt avec le coup de cœur !
Sur les rives de la baie d’Ungawa au nord du Québec, la narratrice revient à Salluit un village du nord du Québec comme chaque été s’occuper des enfants. Mais cette année elle ne retrouve pas son amie Eva assassinée dont le fjord a englouti le corps.
En s’adressant à son amie, elle dit tout son amour pour cette région, son attachement à cette nature et à ses habitants. La narratrice ne peut que se demander en voyant les enfants dont elle s’occupe ce qu’ils deviendront dans quelques années. Parce qu’il y a les fléaux modernes, les violence faites aux femmes et la fin de l’innocence qui arrive souvent bien trop vite chez les enfants. Bien sur, elle n’est pas la seule blanche à venir mais son amour pour cette région est sincère.
Avec ce cri du cœur pour le Grand Nord, l'auteure évoque les décisions (économiques et politiques) et décrit l'importation d'une culture qui a modifié le mode de vie des Inuits. Son propre désarroi et ses questionnements se font sentir et c'est poignant. Un portrait réaliste où la beauté, la dureté et une sorte de résignation se mêlent sans rendre ce livre plombant.
De l’attachement viscéral de la narratrice aux constats âpres qui pointent du doigt les contradictions, j’ai frôlé de peu le coup de cœur ( oui!) tant j’ai été remuée par cette écriture et par le contenu ( j’ai juste trouvé que la deuxième partie consacrée au fils d’Eva était moins puissante). Sans fard ni pathos mais avec une justesse qui touche le cœur et l'âme, il s'agit d'une lecture très forte qui laisse des traces durables.
Votre maison ne vous appartient pas. Votre terrain non plus. Tout ça vous est gracieusement prêté par le gouvernement. N'est-ce pas qu'on est fins ? On vous pique votre territoire, mais on vous le prête après. Est-ce pour ça que vous avez tellement besoin de posséder ? Des motoneiges, des bateaux, des quads, des camions pour faire le tour d'un village de quatre rues. Pour vous échapper de vos maisons surpeuplées où vous vivez les uns sur les autres. Vous manquez d'espace dans votre immensité nordique. Comment ça se fait que toute cette richesse ressemble tellement au tiers-monde ?
Je voudrais être mieux que ça mais je suis strictement comme les autres.
Les billets d'Aifell, Fanny, Jerôme, Kathel et de Sabine.
Sur les rives de la baie d’Ungawa au nord du Québec, la narratrice revient à Salluit un village du nord du Québec comme chaque été s’occuper des enfants. Mais cette année elle ne retrouve pas son amie Eva assassinée dont le fjord a englouti le corps.
En s’adressant à son amie, elle dit tout son amour pour cette région, son attachement à cette nature et à ses habitants. La narratrice ne peut que se demander en voyant les enfants dont elle s’occupe ce qu’ils deviendront dans quelques années. Parce qu’il y a les fléaux modernes, les violence faites aux femmes et la fin de l’innocence qui arrive souvent bien trop vite chez les enfants. Bien sur, elle n’est pas la seule blanche à venir mais son amour pour cette région est sincère.
Avec ce cri du cœur pour le Grand Nord, l'auteure évoque les décisions (économiques et politiques) et décrit l'importation d'une culture qui a modifié le mode de vie des Inuits. Son propre désarroi et ses questionnements se font sentir et c'est poignant. Un portrait réaliste où la beauté, la dureté et une sorte de résignation se mêlent sans rendre ce livre plombant.
De l’attachement viscéral de la narratrice aux constats âpres qui pointent du doigt les contradictions, j’ai frôlé de peu le coup de cœur ( oui!) tant j’ai été remuée par cette écriture et par le contenu ( j’ai juste trouvé que la deuxième partie consacrée au fils d’Eva était moins puissante). Sans fard ni pathos mais avec une justesse qui touche le cœur et l'âme, il s'agit d'une lecture très forte qui laisse des traces durables.
Votre maison ne vous appartient pas. Votre terrain non plus. Tout ça vous est gracieusement prêté par le gouvernement. N'est-ce pas qu'on est fins ? On vous pique votre territoire, mais on vous le prête après. Est-ce pour ça que vous avez tellement besoin de posséder ? Des motoneiges, des bateaux, des quads, des camions pour faire le tour d'un village de quatre rues. Pour vous échapper de vos maisons surpeuplées où vous vivez les uns sur les autres. Vous manquez d'espace dans votre immensité nordique. Comment ça se fait que toute cette richesse ressemble tellement au tiers-monde ?
Je voudrais être mieux que ça mais je suis strictement comme les autres.
Les billets d'Aifell, Fanny, Jerôme, Kathel et de Sabine.
Inscription à :
Articles (Atom)