Qui dit dimanche dit atelier d'écriture chez Gwen. Et aujourd'hui, le thème est le suivant : "Je vous propose de vous mettre dans la peau d’un parent d’adolescent (si c’est là votre costume habituel, ce n’en sera que plus facile…). Un jour, excédé par le bazar indescriptible qui règne (forcément) dans la chambre de votre rebelle, vous décidez de vous lancer dans une grande séance de ménage. Et là, vous tombez sur son journal intime. L’ouvrir ou pas? Le lire ou pas? Telles sont les questions que vous vous posez. Je vous laisse choisir et raconter…"
Et voici mon texte :
Claire s’habille. Elle hésite à porter ce chemiser. Non décidemment, il n’irait pas avec son nouveau jean. Elle cherche dans son dressing bien fourni autre chose. Le gilet qu’elle a acheté le mois dernier serait parfait. Elle soulève des montagnes colorées. Impossible de mettre la main dessus. Maud, sa fille le lui a emprunté et ne le lui a pas rendu. Maud dort chez une copine ce week-end et à cette heure ci, inutile de vouloir l’appeler sur son portable. Claire prend la décision d’aller dans sa chambre. Pourtant, elles ont un accord : Claire n’a pas le droit d’y rentrer sans l’accord de sa fille, c’est à dire rarement. Quand Maud le lui avait demandé, Claire avait acquiescé. A 15 ans, il est normal qu’elle ait sa propre intimité. La porte s’ouvre sur un désordre sans nom. Un capharnaüm ! Des vêtements jonchent le sol parmi les livres, les cahiers de cours. Des magazines aux pages tâchées de vernis à ongles recouvrent le bureau. Des tasses, un yaourt, un paquet de gâteau éventré laisse échapper des biscuits en miettes. Claire regarde où poser les pieds. Un tube de colle semble s’être ancré dans le beau parquet.
C’en est de trop ! Et son pull ? Sûrement enseveli sous la montagne de vêtements. Chaussettes solitaires cherchant l’âme sœur, t-shirts propres ou sales tout est mélangé. En soulevant un bas de jogging, sa main tombe sur un objet épais. Livre de maths ou de latin ?
Claire s’interroge. Non, il s’agit d’un cahier épais. Sur la couverture, deux mots "journal intime" écrits par Maud . Etonnée, elle le fixe. Elles sont complices et Maud lui confie tout. D’ailleurs, les amies de Claires l’envient, jalousent cette relation mère-fille. Claire ne peut s’empêcher de s’enorgueillir. Les compliments de ses amies. nourissent sa vanité. Celle d'avoir réussi là où elles ont échoué.
Ce journal est une faille qui ébranle ses certitudes. L’envie de l'ouvrir la tenaille. Lire juste quelques lignes. Après tout, peut-être est ce simplement un cahier où Maud note les noms de produits de maquillage ou colle l’image de la super veste qu’elle a repéré sur un site quelconque. Le mot intime est souligné comme une mise en garde. Depuis quelques semaines, Maud a changé. Elle passe plus de temps dans sa chambre. Et quand Claire lui a proposé une sortie shopping suivie d’un ciné, Maud a refusé. Ce n’est pas son genre. Aux questions de sa mère, elle a prétexté du travail et des exposés à préparer. Claire n’est pas dupe, sa fille lui cache quelque chose. Pourtant, Maud lui toujours dit tout. Les disputes avec les copines, le gars de troisième sur qui elle flashe et qui lui rend à chaque fois son sourire. Maud ne peut rien lui cacher, cette simple pensée suscite en elle de l’énervement. Elle a élevé toute seule Maud, lui a offert tout ce qu’elle n’a pas eu étant enfant puis adolescente. Claire travaille beaucoup. Elle rentre souvent tard et compense son absence par des cadeaux. Son pied heurte un petit sac poubelle. En le prenant, le sac percé laisse échapper un bracelet. Ou ce qu’il en reste. Les petites pierres ont été cassées, broyées. Claire ouvre le sac et découvre le contenu. Des boucles d’oreilles tordues, un t-shirt soigneusement lacéré, …Le sac est la sépulture de tous ses cadeaux. Claire reste impassible. La sonnerie du téléphone la sort de sa torpeur. Elle répond à l’appel, elle reconnait la voix d’Isabelle une de ses amies. Cette dernière se lance dans une longue mélopée. Sa fille lui a répondu, le ton est monté et les mots aussi. Mais qu’est ce que je dois faire ? lui demande Isabelle. Je suis à bout de nerfs !
Claire regarde le journal et le sac poubelle une dernière fois, elle ferme la porte et répond à Isabelle :
Oh ma pauvre ! Je suis embêtée. Que te dire ? Avec Maud, nous ne connaissons pas ce genre de conflits, tu sais bien…
Claire se regarde dans le miroir du couloir. Elle préfère oublier ce qu’elle a vu. Sa relation avec sa Maud est parfaite. C’est son trophée personnel et personne ne le lui volera. Pas même sa fille.
9 commentaires:
C' est une histoire très forte qui fait frémir les mères d' adolescentes! En même temps, le personnage de Maud va s' en doute pouvoir grandir en ayant symboliquement coupé le cordon.
Ton blog est une merveille.
j'aime beaucoup ton texte clara !
je me souviens de cette période où j'écrivais dans mon journal et où maman m'énervait !! quand la relation est fusionnelle, difficile de grandir sans couper le cordon fut ce de manière un peu violente. Cela n'empêche pas à la relation mère fille de rester forte.
je vais me lancer de ce pas dans mon texte. le tiens est très bon, comme dh'abitude.
Un très joli texte que j'ai pris plaisir à lire !
Heureusement que j'ai envoyé le mien avant d'avoir lu le tien : je crois que je n'aurais pas osé si je l'avais lu d'abord... Il est très beau, très fort, et fait frémir ! Du grand art !!!
c'est magnifique, très touchant...
Que celle qui n'a pas eu une fille de quinze ans nous jette la première pierre! Je te reçois cent sur cent!
@ Orfeenix : je suis mère d'ados et j eme suis inspirée du désordre de la chambre de fifille Ado Number one . Merci du compliment !!! je suis scotchée et toute rouge !
@Luci : merci Lucie! en tant que mère ne pas répéter les erreurs de sa propre mère, arghh, élever des ados n'ets pas un long fleuve tranquille ...:)!
@ Chpupynette : je dis chapeau bas pour le tiens !
@ Saxaoul : merci beaucoup!
@ Amélie : fichtre! je vais devenir rouge tomate avec tous ces compliments!Merci!
@ Irrégulière : merci beaucoup!!!
@ Célestine : yes!!!!!
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