vendredi 9 décembre 2011

Laurence Cossé - Les amandes amères

Éditeur : Gallimard- Date de parution : Septembre 2011 - 220 pages sobres et émouvantes !

Edith, la quarantaine, mariée et mère de famille est traductrice. Elle mène une existence confortable à Paris. Afin de rendre service au départ,  elle emploie Fadila pour quelques heures de repassage  par semaine. Fadila âgée de soixante-cinq ans  est d’origine marocaine et analphabète. Un handicap pesant, contraignant et humiliant. Quand Edith le découvre, elle décide de lui apprendre à lire et à  écrire.

La vie quelquefois permet des rencontres entre des personnes de mondes différents. Quand je parle de rencontre, ce n’est ouvrir sa porte à la femme qui vient effectuer le ménage chez vous et lui adresser un bonjour poli mais distant. Non, je parle de chercher à connaître l’autre et de dépasser les barrières visibles ou invisibles. Ne pas savoir lire et écrire notre langue  est un handicap quotidien.Quand Fadila accepte qu’Edith lui apprenne à lire, elles s’engagent toutes les deux dans une aventure profondément humaine. Sous des aspects un peu rigides, Edith pleine de bonne volonté se renseigne sur les différentes méthodes d'apprentissage. Elle appréhende de  ne pas savoir s’y prendre, d'échouer ou de blesser Fadila. Car Fadila a une forte personnalité et de l’orgueil. La  méfiance du départ s’estompe petit à petit. Au fil des semaines puis des mois, Fadila accepte de s’ouvrir un peu plus à Edith et de lui raconter sa vie. Sa jeunesse  soumise au poids des traditions marocaines, ses mauvais maris, les enfants et  l'exil en France. Mais, apprendre les bases se révèle plus compliqué que prévu et Fadila a d’autres soucis. Familiaux et matériels. Même si elle se sent souvent découragée par le manque de résultats, Edith persévère. Ce pari un peu fou  les rapproche. L’apprentissage des mots devient le trait d’union entre Edith et Fadila.

Une forme d’amitié singulière sans effusion de tendresse ou de grandes embrassades se révèle dans l’écoute, dans la persévérance à vouloir aider l’autre. Elle peut se déceler aussi  dans un  regard reconnaissant et sincère. C’est ce que nous raconte également Laurence Cossé. 

J’ai été émue par ces deux femmes dont leurs trajectoires se croisent !  Dans une écriture tout en finesse et très sobre, Laurence Cossé instaure une passerelle  entre ses personnages et le lecteur.  Et Fadila ou Edith pourraient être deux personnes que l’on vient de croiser dans la rue. Ce roman donne envie d'aller de l'avant et vers les autres car  donner sans attendre un retour est tout simplement  merveilleux !

Tout au long de ma lecture,  j’ai pensé au témoignage de Bertrand Guillot B.a. –ba la vie sans savoir lire. Un seul conseil : lisez-les deux !!!
 
Edith doit mal s’y prendre. Elle ne trouve pas comment faire jouer la clé. Une vieille scie de pédagogues lui revient à l’esprit : «pour apprendre à lire à Jules il faut commencer par connaître Jules ».

16 commentaires:

mimi a dit…

Recommandée par mon libraire ,ce livre attend sagement sur la pile.

Mangolila a dit…

Pas trop de bons sentiments tout du long j'espère! Il me faut un peu de salé dans le sucré! Remarque, le titre donne la réponse avec le côté amer, je m'en aperçois seulement maintenant.

keisha a dit…

Au début je pensais aussi au livre de Guillot. Ton billet donne envie, surtout que dans une autre vie je me suis lancée dans l'apprentissage de l'écriture de mon petit personnel de maison... Une belle aventure, même si j'y allais dans le brouillard côté méthodes...

Nadael a dit…

Je pensais lire ce livre...avec ce billet c'est décidé, il faut vraiment que je lise ce roman!

Anne a dit…

L'écoute, l'ouverture à l'autre tel qu'il est, un adulte qui apprend à lire : ça m'intéresse énormément tout ça ! Merci, Clara.

lireenligne a dit…

Belle histoire, je comprend ton émotion...

Clara et les mots a dit…

Je m'excuse d e faire une réponse groupée mais ma tension joue au yoyo.

Si c'est une belle histoire, il n'y a pas de bons sentiments. Edith n'est pas une femme à sa vanter auprès des autres d'aider Fadila.

Attention, les deux dernières pages sont terribles et relèvent encore plus le goût amer de ce roman.

J'ai tellement aimé ce livre que j'ai le cœur lourd de le rendre à la biblio... C'est dire!

Ah oui, je voulais juste rajouter que dans ce roman , les références de site internet ou de logiciels gratuits pour l'apprentissage de personnes analphabètes sont existantes.

sylire a dit…

Un livre qui semble faire l'unanimité et une auteure que j'ai repérée.

Aifelle a dit…

Je l'ai noté chez Antigone, j'espère le trouver à la bibliothèque.

Anis a dit…

J'avais beaucoup aimé "Au bon roman". Décidément Laurence Cossé est une femme qui s'engage.

leiloona a dit…

J'ai lu le billet d'Antigone ce matin. je le lirai, pas pas tout de suite ! :)

antigone a dit…

C'est effectivement un très bon roman, touchant et tout... et que Mango ne craigne rien je n'aime pas non plus les bons sentiments à gogo. Edith a parfois envie de baisser les bras et fadila n'est pas une élève facile !! ;)Je comprends que tu sois remuée par les dernières pages Clara.

Cécile a dit…

Sujet sensible pour moi qui ait connu ma belle-mère analphabéte (et immigrée elle aussi) se débattre dans l'éducation de 9 enfants en plus atteints de dyslexie pour certains ( dont mon mari...) . Bref, une famille soumise aux regards narquois et aux sarcasmes de certains énergumènes de l'Education Nationale. Et 50 ans après, cela laisse des plaies profondes. Je peux aussi citer la remarque lapidaire soulignée par 2traits rouges sur le carnet de santé de mon époux alors âgé de 9ans : "élève sans aucune motivation , parents analphabètes". J'éprouve une rage terrible à retranscrire çà, crois-moi !!! Désolée de m'être épanchée... Tout cela pour dire que bien sûr, je lirai ce livre (j''ai déjà lu l'auteur que j'apprécie) , "le b-a ba" est aussi dans ma Pal.

Géraldine a dit…

Le sujet m'intéresse. je note ! Et je suis normalement sur une liste de livre voyageur pour le 2ème !

Alex Mot-à-Mots a dit…

Un roman optimiste, chic. Cela fait du bien de temps en temps.

Géraldine a dit…

Je sors de ce livre... Et cette lecture m'a bouleversée et captivée.